Carnet de route

« L'aventure c'est l'aventure »
Le 18/10/2014 par Béa
« L’aventure c’est l’aventure »
Escalade en terrain d’aventure les 18 et 19 octobre 2014.
Première partie : « Pourquoi soulever des montagnes alors qu’il est si simple de grimper dessus ? » (Boris Vian)
Cher Boris,
Avec tout le respect que je te dois et en souvenir de mes lectures adolescentes, il me semble que tu te mets le doigt dans l’œil ; pour ton excuse, tu n’as certainement jamais grimpé en terrain d’aventure avec le CAF d’Angoulême, aussi, je n’en ferai pas une montagne.
Car s’il est inutile de soulever les montagnes-sauf pour les déplacer à Angoulême- en revanche, il n’est pas si simple de monter dessus : tout d’abord, cela parait une évidence, il faut savoir grimper…mais pas seulement !outre les manips indispensables qui ont nécessité quelques révisions trois mercredi de suite à Chateauneuf ,il a fallu le premier jour de notre arrivée dans les Pyrénées avoir quelques notions théoriques avec exercices pratiques à l’appui sur l’utilisation du matériel de terrain d’aventures.
Mousquetons, câbles, friends, sangles, nous ressemblons à des camelots* partis vendre leur quincaillerie aux lézards impassibles qui se chauffent sur la paroi.
(* note de l’auteur : rien à voir avec le siège de la cour du roi Arthur ni avec une célèbre série télévisée qui porte le même nom).
Après quelques essais concluants, nous voici directement en situation : Nicolas nous emmène au cap d’Aou grimper « les cannes de Jeanne » : et c’est un véritable festival… de Cannes ! (c’est un peu facile mais je ne résiste pas).150 mètres, 4 longueurs+ 2 longueurs d’arête ; dalle, cheminée, mur, fissure, il ne manque rien à notre itinéraire mitonné par notre initiateur-organisateur.
Pose de friends, de lunules, relais sur un beau chêne, autant de situations variées qui nous font découvrir Dame nature dans toute son ingéniosité ; il faut rester prudent tout de même, vérifier la résistance des points que nous installons et la qualité du rocher : nous ne sommes pas dans un univers aseptisé.
Enfin, la marche d’approche* nous a mis tout de suite dans l’ambiance.
(*« Un infâme pierrier » qui « vaut bien sa réputation » d’après notre envoyé spécial de Camptocamp)
Heureusement pour nous, il fait beau et très chaud mais il ne faut pas oublier que nous sommes fin octobre et que le jour décline vite : nous risquons de finir sous les spotlights de nos frontales.
En attendant une hypothétique carrière hollywoodienne, voici que notre metteur en scène, avec son porte voix appelle deux retardataires qui ont disparu des projecteurs et signe le clap de fin : il est trop tard pour une nouvelle prise (d’escalade):nous apprenons qu’à défaut de décrocher le prix du meilleur espoir masculin dans « premier de cordée », Jojo a laissé tomber son décroche-coinceur dans la voie.
C’est ainsi qu’en pleine ascension, notre étoile montante se retrouve en pleine désescalade avec Sylvia, son infortunée partenaire.
Qu’importe ! Que le spectacle continue !les deux premières cordées repartent, Yann et Catherine en tête, à l’assaut d’une cheminée (cotée en 4c sur le topo mais à l’unanimité bien plus difficile que la précédente longueur notée en 5.)
Moralité : en terrain d’aventure, la cotation est aux voies ce que la résistance est aux points de progression : elle est toute relative ; quoiqu’il en soit, il ne fait pas bon tomber … encore bravo aux ouvreurs pour cette « première » et ce n’est pas du cinéma, croyez moi.
Toutefois, le soleil commence à décliner et ceux qui pensaient faire une pause syndicale en sont pour leurs frais :notre initiateur/metteur en scène nous presse de sortir de la voie avant la nuit pour attaquer sans tarder la première descente en rappel ;nous nous échapperons juste à temps pour entamer le second rappel dans une nuit noire comme de l’encre, ce qui ne nous empêche pas d’avoir les idées claires :il faut rester attentif à ce que l’on fait et préparer ses arguments pour ceux qui nous attendent en bas avec une pointe d’inquiétude.
Tout en descendant ce maudit pierrier et du fin fond des ténèbres, j’ai donc pensé à cette citation lumineuse qui m’a rassérénée :
« Mieux vaut s’enfoncer dans la nuit qu’un clou dans la fesse » (Pierre Dac )
Clap et fin de la première partie
« L’aventure c’est l’aventure »
Escalade en terrain d’aventure les 18 et 19 octobre 2014.
Deuxième partie : Tout chasseur sachant chasser…
Les chasseurs de sanglier que nous avons rencontrés ce jour là ont commencé par plomber l’ambiance : nous voici partis pleins d’allant gravir la face sud de la Picarre dans la vallée de Nistos et voilà que ces grognons nous font comprendre que nous n’avons pas élevé les cochons ensemble, même si nous partageons le même territoire. : Ces derniers (les chasseurs, pas les cochons) nous déclarent qu’ils n’apprécient guère un certain gibier de potence qui, pendu au bout d’une corde effarouche leur mammifère forestier favori en poussant dans les voies des « caillou ! » « vaché ! » « relai ! » « libre ! » à cor et à cri.
Nicolas anticipe donc sur un conflit grimpeurs/chasseurs (lesquels sont également exaspérés par les cueilleurs de champignons) et prend toutes les précautions d’usage pour lisser dans le sens du poil nos voisins déjà hérissés à la vue de nos casques.
Chacun peut pratiquer son activité sans gêner l’autre, nous nous ferons les plus discrets possible : cochon qui s’en dédit !
Hélas ! chassez le naturel, il revient au galop :après quelques instants de silence, nous avons besoin de révisions de dernière minute avant de nous lancer dans la voie ;nous parlons un ton en dessous mais pas assez bas au goût de ceux qui sont en embuscade : des coups de feu, des aboiements de chiens et la colère d’un chasseur résonnent dans la forêt :l’homme à la pétoire semble en pétard car son « singularis porcus » aux oreilles sensibles a pris la poudre d’escampette ;et bien entendu, c’est de notre faute .
Au ton de la voix, nous comprenons qu’il a envie de nous hacher menu ; ce n’est pas le moment de se demander si c’est du lard ou du cochon et de toutes façons, mieux vaut éviter toute discussion qui pourrait tourner au vinaigre.
Certains mauvais esprits ne manqueront pas de remarquer que nous l’avons bien cherché, que grimpeurs et chasseurs ne seront jamais copains comme cochon, ce que je conçois parfaitement.
Il est évident qu’un voisinage avec des cueilleurs de champignons aurait été plus facile à gérer mais d’un autre côté, a-t-on jamais vu un champignon s’enfuir au bruit d’un grimpeur…il ne faut pas me prendre pour une truffe.
Après cette séance de bal trap, nous décidons de progresser en silence : cliquetis des friends, glissement des cordes, chuchotements dans les talkies walkies (relais-vaché chut !).
Les lunules et les coinceurs s’installent sans moufter, la première longueur s’effectue avec une prudence de Sioux.
Quelques instants plus tard, la forêt redevient silencieuse et les cordées un peu moins.
Cette fois-ci Jojo la bricole fait équipe avec Nicolas, votre serviteur avec Sylvia (bravo pour les deux longueurs difficiles passées en tête !) puis Yann en flèche avec Catherine et Nanou qui ont l’œil à tout.
C’est le moment de redescendre ; déjà ? Nous y avions pris goût mais il commence à se faire tard et certains doivent prendre la route.
Toutefois, une dernière surprise nous attend : à la recherche d’un endroit pour boire le verre de l’amitié, nous sommes tombés non pas dans une embuscade, mais sur une guinguette toute illuminée, un bar associatif tenu par un couple particulièrement accueillant. Et bien que nous en ayions plein les jambes, nous avons trinqué aux cannes de Jeanne, au pic de la Picarre, aux champignons, aux sangliers et bien entendu à notre metteur en scène qui a su tirer parti du meilleur de nous-mêmes.
Epilogue : Nous avons posé les sacs, rangé les chaussons d’escalade, plié les cordes en espérant que cette belle aventure aura une suite.
En attendant, j’ai pris de bonnes résolutions : je m’entraînerai à dégainer mes dégaines en un éclair (histoire d’épater les chasseurs) et à tirer des rappels plus vite que mon ombre (ce qui est bien pratique lorsqu’on descend dans le noir.)
Enfin, j’ai trouvé une voie particulièrement appropriée pour la prochaine sortie en terrain d’aventure : elle s’appelle… « La tête de sanglier » !
Béatrice Lecoeur-Turgné
Film réalisé sous la direction de Nicolas Fourcade
Assistants : Mathieu Gallo et William Roqué (casting à Chateauneuf )
Script : Béatrice Lecoeur- Turgné
Distribution :
Personnages principaux :
Joël (alias Jojo la bricole)
Sylvia
Catherine
Nanou
Yann
Nicolas
Béa
Avec l’aimable participation des chasseurs de la vallée de Nistos (lesquels ont également tourné dans « les tontons flingueurs »)
Et... de Singularis Porcus dans le rôle du sanglier (prix du meilleur second rôle masculin).
NB : Vous pourrez le contacter pour le féliciter à son adresse : singularisporcus@valleedenistos.fr ou le retrouver à la page suivante : http://www.asterix.com/asterix-de-a-a-z/les-personnages/sanglier.html
Bande son : Aquejohnny chante « l’aventure c’est l’aventure »
Remerciements à Boris Vian, Pierre Dac, Georges Lautner (« les tontons flingueurs ») Claude Lelouch (« l’aventure c’est l’aventure ») ainsi que Michael Hirst et Chris Chibnal (« Camelot »)