Carnet de route
LE GAZ PART DES ECRINS AUSSI
Le 25/11/2014 par peccolo marc
Il était une vallée perdue qui s'enfonçait jusqu'au coeur de très hautes montagnes, on ne sait pas comment des hommes avaient reussi à s'accrocher à leurs flancs, construisant des villages au bord de précipices insondables et cultivant de mini-champs surplombant le Vénéon qui roulait bruyamment ses blocs de granite pleins de cristaux qui lui donne sa belle couleur verte. C'est là le pays de Gaspard. Comment, dans cet endroit où, se nourrir, passer l'hiver ou se soigner relevait de l'exploit, cet homme a pu gravir autant de sommets et faire autant de premières, le tout à la fin des années 1880.??? Malheureux, si parfois votre égo a fait des siennes et vous vous êtes senti très fort, SVP retombez sur terre devant la raclée infligée par ces pionniers. Aujourd'hui encore quand on fait la Meije, ne met-on pas nos pieds au centimètre près dans ceux de Gaspard (1877 ! ). Merci pour la leçon mister Gaspard.
En cet été 2014, c'est vers la Grande Traversée des Ecrins ( voie ouverte par Gaspard !) que nous lorgnons, sauf que cet été ressemble au mieux à un automne voire plus. Nous allons faire un repérage a la jumelle et un rayon timide de soleil nous montre la face sud des Ecrins dégoulinante de glace. Pour un mois d'Aout, c'est pas banal ! Le gardien du refuge Temple Ecrins nous confirme que personne n'a fait la traversée cette année et que dès qu'il y a du nouveau, il nous appellera. Le coup de fil tant attendu arrive avec un jour ou deux de beau temps : "vous pouvez venir , deux anglais sont partis faire la Traversée ce matin, le soleil a dû faire fondre la glace, on est tout de même au mois d'aout". Nous arrivons au refuge où nous trouvons ...les 2 anglais : " impossible passer, plein de glace et verglas, trop difficile, on a fait demi-tour !! ". Le hasard des rencontres ( ou la bonne idée du gardien ) fait que nous sommes à la même table que quatre jeunes affamés super marrants qui demain, eux aussi en veulent à la Traversée. Dans l'ambiance du repas, on se jure de la faire ensemble cette sacrée traversée. Le lendemain ( euh! plutôt dans la nuit ) trois bonnes heures de marche bien raide nous enmènent à l'attaque.Aie ! Aie ! Les anglais avaient raison, tout est couvert de glace et de verglas bien luisant dans le faisceau de la frontale. Poliment ( pour une fois ) nous laissons partir nos nouveaux copains dans la première longueur qui s'éternise un peu. Je commence à avoir froid et je démarre plus à droite et je me régale sur ce terrain bien que je n'ai qu'un seul piolet, de vieux crampons ( normalement c'est de l'escalade! ) et pas de broches à glace ( merde, Gaspard n'en avait pas non plus ! ) Yes, c'est passé, nous nous retrouvons au-dessus et maintenant nous ne ferons pas demi-tour, juré ! Nous atteignons le fameux câble installé en 1881 ( à l'époque on redescendait par la même voie sans faire la traversée ), puis suivent une belle cascade de glace, du rocher sans verglas, du mixte sympa et un beau couloir de neige. Un beau passage de corniche cloture la fête et c'est le sommet magique de la Barre des Ecrins. Nous descendons le beau mixte facile de la Barre et un rappel nous dépose dans une neige très profonde sur la voie normale, nous rejoignons le col des Ecrins où une bonne pause devient évidente car nous n'avons rien mangé ni bu depuis le départ et en plus, on a tenu parole, nous sommes restés ensemble durant toute la course. La fatigue aidant, la descente du col des Ecrins équipée de cables demande encore de la concentration et quatre heures avant d'atteindre par la vallon de Bonne Pierre ( pas de problème, son nom a bien été choisi ) le premier bistrot de La Bérarde. Un bon bain de siège dans le torrent fera disparaître la fatigue dans les eaux vertes du Vénéon...
