Carnet de route

La montagne sourit aux fortunés
Le 23/10/2022 par Catherine
Au programme, Gavarnie : le petit Astazou puis la brèche Passet, avec bivouac
Si Matthieu me dit que c’est pour moi, c’est bon, je m’inscris. Idem pour Basile et Mika. Pour l’occas, Basile et moi investissons dans un duvet à la hauteur de notre future aventure : 300 € pour notre beau Cumulus Explorer avec 500g de duvet . Mais c’est pas grave, on est riches, on peut… Sinon, pourquoi Basile aurait-il bossé tout l’été ?
Après, je cherche un peu ce que c’est… Bon, les 2 voies sont de 500 puis 450 mètres en 4+ max (mais en alpi faut traduire terrain d’aventure AD+) donc sur le plan technique, ça passe pour tous, pas la peine de s’éterniser sur le topo. Par contre, l’accès, c’est une autre paire de manches… Le passage entre la 1e et la 2e voie, c’est pas gagné…
L’optimisme de Matthieu m’affole quand même un peu… beaucoup ! Je ne sens pas l’enchainement des 2 voies sur la même journée, encore moins avec les 1100m de dénivelé d’approche pour atteindre la première ! Et pas de ravitaillement en eau à espérer. S’ensuivent un certain nombre d’échanges…
Au final, on part vendredi midi d’Angoulême, pour faire la marche d’approche de 18h30 à 22h, avec une pause pour faire le plein d’eau pour 48h au refuge des Espuguettes. On finit à la frontale et dans les nuages. On avale les bons « lioph » améliorés avec le fromage local acheté à Gavarnie et on se prépare pour notre nuit ultra grand luxe (trop d’étoiles pour pouvoir les compter) : le bivouac. Moi, la fille, la plus vieille et la moins endurante, privilégiée, on me réserve le plus plat. Pour s’installer, Basile pose son sac avec une telle délicatesse que son duvet en saute pour débarouler lentement d'abord mais sûrement dans la pente et disparaitre de notre vue. Et Basile qui sort « je sentais que j’allais la faire celle-là » puis qui part prudemment à la suite de son duvet, on ne sait jamais… mais le dénivelé n’est pas minime et finit par des falaises ! Pendant qu’il balaie les pentes avec sa frontale, on fait l’inventaire : on peut tous les 3 ouvrir nos duvets en 2 pour faire une grande couverture, s’emballer dans les 5 couvertures de survie, dormir chaussures aux pieds et toutes les couches possibles sur nous. Nuit pourrie mais on survivra au gel. L’art de transformer un bivouac 4 étoiles en … 4 cristaux ! Heureusement, Mika détend bien l’atmosphère avec « Dire qu’il a balancé son duvet tout neuf avant même d’y avoir posé le c…l ». Ah, ces jeunes fortunés qui jettent l’argent par les fenêtres, même quand y’a pas de fenêtre !
Enfin, on voit la frontale de Basile qui revient droit vers nous : il a fini par abandonner les recherches, fait un dernier balayage de lumière avant de remonter et, sur le côté, miracle : il aperçoit son duvet qui l’attend, juste posé bien dressé sur un coin de rocher. Vous imaginez le soulagement pour tous… Finalement, nul besoin d’être fortuné pour pouvoir compter sur sa bonne fortune. Merci Basile pour la meilleure blague du WE !
Au milieu de la nuit, quand les nuages sont descendus dans la vallée, nous passons un moment tous éveillés et surtout émerveillés par les milliers d’étoiles dans cet hôtel de luxe, les sommets éclairés par la lune et la mer de nuage. Et à l’aube, on ajoute les touches ocrées sur les sommets et les trainées colorées dans le ciel. Merci Mika pour les photos.
Et merci Matthieu pour la surprise des croissants au p’tit dej. Il est temps d’attaquer enfin l’arête du Petit Astazou.
Goulu, Matthieu la dévore en 4h, tractant Basile qui ne lambine pourtant pas et n’a pas besoin d’ascenseur, et ce, sans regarder le topo (faut dire que tout le monde s’accorde à dire qu’il est paumatoire), et avec une déviation à gauche qu’il nous invite à ne pas prendre. Résultat, ils attendront 4h au sommet que Mika et moi, déjà plus tranquilles à la base, arrivions. On ne dira pas combien de fois on a sorti ce satané topo pour essayer de trouver des repères qui finalement n’étaient jamais les bons, on ajoutera une petite traversée à gauche suivi d’un demi-tour…, quelques autres boucles à gauche… Mais on arrivera quand même au sommet à notre rythme. Pendant ce temps, Basile et Matthieu ont eu le temps de faire la causette avec les randonneurs alpins emmenés par Michel (allez voir son carnet de route) et de constater que l’accès à l’arrête Passet par ce côté est trop pourri. Donc on n’ira pas. Changement de programme : on va rejoindre les randonneurs au refuge non gardé de Tuquerouye. C’est parti pour 2h de descente et désescalade (dans du 2– 3 max) dans un paysage très minéral pour rejoindre le lac, avant la courte mais pentue montée à la cabane. Malgré les provisions que j’ai grignotées tout au long de la journée, je suis cuite une heure avant l’arrivée et dois donc encore plus prêter attention à mes pas. Les gars m’attendent patiemment.
L’apéro devant la cabane (bondée), face au lac et au mont Perdu, me requinque salutairement. Après, on tasse nos randonneurs qui ont fini leur repas pour dîner à notre tour. Matthieu qui nous a prévu les diners nous prépare une soupe qu’on trouve si bonne que Cathy finit par demander qui l’a faite (heu, Royco ou Magie ou… ?). On finit par adorer les lyoph, nous, même les pâtes trop épicées !
Après, on décide de dormir à l’intérieur, les gars me laissent la dernière place du dortoir, où je finis par dormir à l’inverse de mes voisins pour éviter leur ronflement à trop peu de centimètres de mes oreilles. Les gars se partagent le réfectoire avec un autre groupe et observent toute la nuit le défilé des occupants du refuge. Au petit dej, nous reconnaissons à l’unanimité avoir mieux dormi dans notre hôtel mille étoiles ! Merci aux randonneurs de nous avoir laissé un litre d’eau pour le thé du matin (on était un peu justes en réserves pour faire le retour).
Ce dimanche, c’est le retour cool : après un échauffement rude par la descente de la cabane vers le cirque d’Estaubé, on remonte à la Hourquette d’Alans, puis descente au refuge des Espuguettes et enfin Gavarnie. Au concours d’ampoules, je crois que mon petit orteil a gagné ! Mais rien de tel qu’une trempette dans la rivière pour se sentir mieux et surtout moins poisseux. Et bien sûr, pot avec vue sur le cirque puis approvisionnement en fromage.
Nous prenons la route du retour et, à vers Aire sur Adour, nous nous lançons dans une chasse à l’homme : nous avons repéré la trace GPS d’un grand gaillard de presque 2 m, pas vu depuis longtemps. Mais comme il y a un décalage dans le temps dans l’enregistrement des infos, on croit pouvoir l’intercepter à un croisement puis on se rend compte qu’il y est déjà passé depuis longtemps ! Mais, enfin, après quelques tours dans la campagne landaise, on le cueille à l’entrée d’un village. C’est chouette de partager une tourte aux myrtille de Gavarnie dans un bar avec Gautier parti une semaine sur les chemins de Compostelle avec son père !
Mais faut bien continuer notre route… Je crois que c’est la première fois que j’arrive avant 20h d’un WE pyrénéen.